Appel à communication

 Quelle place pour les ports territoriaux dans le système maritime de demain ?

 

L'appel à communication est prolongé jusqu'au 30 avril 2023.

 

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Si la recherche portuaire accorde une place privilégiée aux grands ports, les petits ou moyens ports (ports territoriaux) ne doivent pas être oubliés.

Les ports majeurs s’affirment comme un élément fondamental du transport maritime qui participe activement au mouvement général de mondialisation de l'économie. Le transport maritime est en effet un pilier physique de notre économie mondialisée en interconnectant les continents. Ainsi, un incident en matière de transport maritime à l’autre bout du monde peut bloquer le trafic maritime et dérégler des secteurs entiers de l’économie. Ce transport maritime est soumis à plusieurs évolutions qui nécessitent des changements importants comme la tendance au gigantisme des porte-conteneurs qui conditionne pour partie les stratégies des différents acteurs portuaires. De même, la question de la transition énergétique ou celle de la digitalisation sont particulièrement sensibles aujourd'hui. La tendance nouvelle à la relocalisation des moyens de production dans les pays consommateurs vient quant à elle interroger l'organisation structurelle de filières internationalisées et les flux de transport de marchandises.

Dès lors, les plus grands ports maritimes, aux forts tonnages, sont au cœur des questions de recherche. Selon l’UNCTAD, le volume transporté par la voie maritime pourrait presque doubler en quelques décennies. Les ports de taille moyenne et/ou aux plus faibles trafics auront un rôle à jouer pour supporter cette augmentation du trafic et doivent donc être intégrer aux questions de recherche. La France, tout comme nombre de pays étrangers, dispose sur ses côtes d’un chapelet de ports petits ou moyens qui jouent un rôle important pour le cabotage et la desserte des territoires. Ces ports territoriaux, le plus souvent décentralisés, et/ou gérés plutôt localement, constituent un ensemble de ressources d’activité et d'emplois pour leur territoire de proximité. Ils ouvrent des possibilités pour d’autres réseaux d’acheminement et la mise en œuvre de logistiques plus sobres en émissions. Des trajets plus courts ou des supports moins énergivores parce que moins « massifs » peuvent alors être envisagé. Ils sont en cela potentiellement porteurs d’innovations.

Par conséquent, tous les ports sont possiblement concernés par la recherche, quelle que soit leur taille. Dans les « grands » ports comme dans les « petits » se pose en effet la question de la double inscription de ces organismes dans des systèmes à la fois locaux et globalisés. On peut même considérer que certains de ces petits ports représentent des terrains privilégiés d’investigation. Leur accès est peut-être plus facile, et leur structure de gouvernance peut rendre plus aisé, l'observation, l'analyse voire l'expérimentation. Dans une perspective de transition écologique, ils permettent par exemple de réfléchir à la concentration des activités versus leur dispersion, entre économies d’échelle d’un côté et plus grande proximité et circuits courts de l’autre.  De plus cette approche par les ports territoriaux constitue un atout considérable. Elle offre non seulement des possibilités d’analyse dans nombre de bassins maritimes, mais ouvre également la perspective d’approches comparées, selon de multiples combinaisons géographiques possibles.  

 

La place de ces ports, petits et moyens doit donc faire partie intégrante du débat scientifique, car ils participent pleinement aux systèmes portuaires nationaux, avec des problématiques souvent spécifiques, liées à la singularité de leurs trafics. En effet, la densité d'un maillage portuaire est souvent considérée comme un atout indéniable pour le territoire concerné. La gouvernance de ce type d'ensemble, riche de sa diversité, appelle là encore des réflexions croisées.  

Par exemple, en France, on dénombre plus de 500 ports décentralisés. Il s’agit majoritairement de ports de plaisance, mais également pour certains d’entre eux d’importants ports de pêche ou de commerce. D’ailleurs, une étude menée sur un échantillon de 16 établissements portuaires décentralisés, de Calais à Ajaccio en passant par Dieppe, Brest, Toulon et Nice, montre que l’échantillon choisi réalise environ 20% du trafic total des ports français, emploi directement 11 000 personnes et en ajoutant les emplois indirects, l’emploi de ces ports s’élève à 27 000 salariés.

La décentralisation successive vers les communes, les départements ou les régions force désormais à s'intéresser aux compétences de chacune de ces entités territoriales ainsi qu'à leurs modalités d'action. Ce questionnement est encore plus riche et profond quand il s'agit des ports ultra-marins, qui jouent un rôle central dans les espaces insulaires.

Ainsi, ce qui caractérise les petits ports est leur diversité ce qui complexifie les questions.

 

De fait, un premier axe abordé lors du colloque portera sur la définition des ports territoriaux (de petite ou moyenne taille). En effet, même si un large éventail de moyens permet de les définir, principalement autour de critères quantitatifs (manifestation physique de certaines infrastructures, tonnage, l'étendue des infrastructures...), la diversité des situations pousse à approfondir cette réflexion. Au sein de la taxonomie statistique de l'UE, les autorités portuaires qui gèrent un volume annuel de marchandises inférieur à 10 millions de tonnes sont appelées petits ports, et les autorités portuaires qui gèrent annuellement entre 10 et 50 millions de tonnes de marchandises sont des ports de taille moyenne. On peut cependant se demander si ce seuil, repris par l'ESPO (European Sea Port Organisation) et selon lequel les petits ports traitent des cargaisons ne dépassant pas 10 millions de tonnes par an, est réellement pertinent ?

La question de la taille d'un port est toujours dépendante de sa localisation côtière, de son ouverture tant sur l'océan que sur l'arrière-pays, mais également au contexte économique et politique : la différentiation régionale influence la question très relative de la taille d'un port et par conséquent la classification des grands, moyens et petits ports. Par exemple, ce qui est petit dans l'espace méditerranéen peut être qualifié de moyen dans la région baltique et les petits ports peuvent être d'une grande importance régionale.

De plus, les ports territoriaux n’apportent que rarement une contribution significative au commerce maritime international et se trouvent parfois dans une position délicate. Ils n'ont ni la base du trafic ni les moyens, sur le plan des infrastructures physiques, pour modifier leur rang. 

Ils sont ainsi souvent qualifiés de secondaires ou d'intermédiaires, et ancrés sur des trafics de niche. Mais sont-ils pour autant purement des miroirs des ports de grande importance ou diffèrent-ils de quelques façons des grands terminaux ? Quelle place peuvent-ils occuper dans les réseaux maritimes mondialisés et massifiés ? Peuvent-ils réussir dans le développement d’une stratégie importante de diversification de leur clientèle et de leurs types de flux afin d'atténuer l'impact des fluctuations du commerce mondial ?

 

Comme évoqué précédemment, l’accroissement des potentiels de circulation, de voyageurs ou de marchandises, a longtemps été perçu comme un élément de progrès, permettant toujours plus d’interactions et participant au développement d’une économie mondialisée. Pourtant, certaines de ces pratiques sont énergivores et posent des problèmes de pérennité de la ressource ou de pollution. Le shipping est en effet particulièrement concerné : pour la propulsion des navires, chaque année 200 millions de tonnes de fioul lourd sont nécessaire soit 45% de la consommation mondiale. Le transport maritime est responsable de près de 3% des émissions de gaz à effet de serre. Ramené à la tonne chargée, le transport maritime est le mode de transport le moins polluant, mais la décarbonation de ce secteur est un enjeu majeur. Il convient donc de s’interroger sur le rôle potentiel des ports territoriaux dans la décarbonation du transport maritime : densité du maillage, possibilité de report modal vers le cabotage semblent constituer des opportunités. Toutefois, dans les petits ports du monde entier, la complexité de la législation et l'évolution des attentes des parties prenantes rendent de plus en plus difficile la mise en conformité avec la législation environnementale ou sécuritaire à laquelle ces ports sont confrontés. Cette complexité institutionnelle accroit les zones d’incertitude et participe fortement d’une mise en péril de ce type de ports.

 

Également en lien avec les défis potentiels des années à venir se pose la question de l’impact du réchauffement climatique sur les activités industrialo-portuaires qui n’est pas encore suffisamment étudié. Une des premières conséquences notables sera l’exposition des ports maritimes à l’augmentation du niveau de la mer. Comment les ports peuvent-ils prévoir ces risques ? De quelles ressources disposent les ports territoriaux en la matière ?

 

Les ports, y compris territoriaux, repensent régulièrement leurs stratégies pour accompagner la transformation des activités industrielles implantées sur le domaine portuaire. Certaines sont fortement liées à la transformation et à l’exploitation de matières premières fossiles et cherchent à compenser de potentielles baisses de trafics conventionnels de vrac solide et liquide en développant des trafics alternatifs et de nouvelles activités. Cela se traduit par la mise en service de nouveaux (i.e. rouliers, conteneurisés, colis lourds, croisières) mais également par le développement d’activités industrielles en lien avec de la transition écologique : énergies marines, recyclage des déchets, écologie industrielle, économie circulaire, production et distribution d’hydrogène, branchements électriques à quai, réparation navale, etc. Ces problématiques impactent t’elles de manière différentiée grands ports et ports territoriaux ? Ces trafics et activités alternatifs constituent-ils des relais de croissance réels et durables ? Sont-ils en mesure de générer autant de valeur ajoutée que celle issue des trafics carbonés ? Quels dispositifs à mettre en œuvre pour accélérer la transition écologique des ports et renforcer leur attractivité pour des activités industrielles /logistiques plus décarbonées ? Quels impacts sur le modèle économique des ports ? Autant de questions susceptibles d'être développées lors du colloque.

 

Parler de ports territoriaux, c'est également accepter de traiter conjointement la dimension maritime et territoriale de cet ensemble (la seconde étant parfois minorée dans le champ scientifique ou économique). Les ports dont il est question sont potentiellement riches d’enseignements dans le champ du développement territorial et des sciences régionales en général. En effet la territorialisation de ce secteur d'activité s'inscrit dans un mouvement général de décentralisation. Celui-ci oblige les acteurs locaux à opérer des apprentissages afin de se saisir pleinement de compétences parfois nouvelles. En plus de la dimension portuaire, cette phase de territorialisation permet de mettre à jour des processus de gouvernance qui impactent le développement local (au-delà du secteur maritime). Elle permet d'identifier le niveau de "compétences" des acteurs dans des domaines complexes, nécessitant des investissements lourds, des habilités institutionnelles dans des espaces en recomposition : « la décentralisation portuaire active donc une double recomposition : celle des échelles institutionnelles territoriales bien sûr, mais également celle des fonctions portuaires. Et ces fonctions multiples, onéreuses, souvent contradictoires, appellent des choix et des arbitrages. À tout dire, en ce qu’il constitue un territoire dans la ville à lui tout seul, décentraliser un port semble porteur de modifications fonctionnelles beaucoup plus profondes que celles observables dans la décentralisation d’autres types d’outils techniques de transport (une route, un canal, voire un aéroport). » (Debrie, Lavaud-Letilleul., 2009, p. 518)

 

Les ports maritimes sont des zones d’activités économiques et industrielles qui peuvent générer des retombées économiques sur leur espace portuaire et au-delà. Cependant, la présence d’un port territorial est-elle synonyme de création de valeurs ajoutées pour tous les acteurs économiques du territoire sur lequel un port est implanté ?  La présence d'un port territorial est-elle génératrice d'emplois pour le bassin local ? Quel est l’impact socio-économique de ces ports secondaires sur leur territoire et plus globalement sur les territoires ? Les petits ports sont des éléments essentiels des économies locales qui dépendent fortement de la pêche et du tourisme. La multiplicité des activités, commerce, pêche et plaisance, en fait-elle des écosystèmes portuaires particuliers ?

Existe-t-il une complémentarité entre ports territoriaux et grands ports, voire des coopérations ou au contraire sommes-nous plutôt dans un système de coopétition voir uniquement de concurrence ?

Ainsi, il ne s’agit pas de nier le rôle des grands ports et de les exclure de notre réflexion. Bien au contraire, l’approche précédente interroge les jeux d’échelle en recherche maritime et portuaire. L'échelle étant ici à la fois la transcription d'un espace sur une carte, mais également un niveau de prise en compte d'un phénomène. Se pose alors également la question de la desserte des arrière-pays notamment de l’articulation des différents réseaux et modes de transport.

 

Le colloque DEVPORT favorisera par ailleurs le croisement des perspectives en donnant une place toute particulière aux communications portant sur des situations différentes de celles observées en France.

Enfin, le colloque est interdisciplinaire (géographie, histoire, aménagement, urbanisme, économie, logistique, informatique, sciences de gestion...). Au cours de ce colloque, il s’agira donc également de comparer les différentes approches disciplinaires et méthodologiques.

 

 

Les propositions de communication (en français ou en anglais) doivent être déposées avant le1er avril 2023 sur le site de la conférence, en respectant les consignes suivantes :

- résumé d’une page A4 maximum, Times New Roman 12 points,

- titre, auteur(s), fonction(s), affiliation(s),

- mots-clés (maximum cinq).

 

Les meilleurs articles pourront être soumis à une revue (les revues pressenties sont Géotransports et les Cahiers Scientifiques du transport) dans le cadre d'un numéro spécial.

 

 

 

 

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